<$BlogRSDUrl$>

20 août 2007

PSP et couverture médiatique dans le journal de la rue St-Jacques 


Voici venu le temps de mon pétage de coche bi-hebdomadaire contre La Presse.
Dans La grosse Preîsse d’aujourd’hui, on se préoccupe de nids-de-poule et on l’on ne parle de Montebello que pour chiâler contre les manifestants et rapporter qu’il y en a trois qui se sont fait arrêtés. Inversement, et à moins que je ne m’abuse, on y a consacré qu’un seul article depuis une semaine (mais faut convenir qu’il était bien) à la cause de tout ce brouhaha, soit le Partenariat pour la Sécurité et la Prospérité (PSP).
Et Monsieur Lagacé !! Vous trouverez peut-être que je commence à m’acharner sur votre cas (après ce coup-ci, je ferai des posts PatLagacé-free pour au moins un mois, je le jure), mais come on! Entre vous et moi, votre chronique de ce matin ne repoussera pas les frontières de l’excellence journalistique...
Des manifestants qui parlent au nom du peuple alors qu’ils sont toujours les mêmes et qui mettent tout dans le même panier?!?! Wow! Quelles trouvailles !
Il y en a une couple de naîfs dans le tas! Huuuun!??! Qui l’eut crû!??
Et moi qui pensais que les hippies étaient des créatures désillusionnées ne se nourrissant que de cynisme et animées d'une vision hautement complexe de la réalité...
Et puis :
« le peuple» s'en fout. En fait, il ne comprend pas ce que c'est, et ça ne le dérange pas. Il veut juste payer ses lecteurs DVD le moins cher possible.

Ce n’est pas avec des reportages/chroniques comme celui que vous faites qu’ils risquent de s’en préoccuper... C’est assez drôle parce qu’en fait, vous dites pas mal la même chose que plusieurs manifestants, sauf que ces deniers vont appeler ça de l’aliénation: soit quand la culture consumériste occulte les intérêts politiques. Vous devriez lire un type qui s’appelle Adorno, ça pourrait vous plaire. J’en suis pas un fan mais si ça vous branche...
Seule once de contenu dans votre truc : les négociations sont secrètes.

Le fait qu’on intègre formellement trente des plus grands patrons du continent dans le processus de décision, ça ne sonne pas quelques cloches chez vous? Pourquoi trente? Pourquoi ceux-là? Et si ces gens qui voyagent en jet privé et dont la gigantesque fortune personnelle dépend directement des flux de marchandises à la frontière pouvaient avoir une légère propension à ne pas se soucier autant que la moyenne des gens des contrôles subis à l’aéroport ou la frontière ?
Et l’idée que le Canada se fasse imposer des normes élaborées chez, et par les voisins du sud ? S’en fout? Que la sécurité ne concerne apparemment que les mesures anti-terroristes de contrôles aux frontières alors que les questions de sécurité alimentaires et phytosanitaires sont reléguées au second rang (voire au six-cent soixante treizième), c’est un détail?
Et si sous des apparences d’enjeux techniques et de banale harmonisation de normes et standards, on en profitait en douce pour faire passer des trucs qui autrement ne passeraient pas si facilement?
Tiens, je vais vous en conter une.
En 1996, Lucien Bouchard, dans son souci de favoriser le rétablissement des finances publiques et de la prospérité du Québec met sur pied un comité consultatif chargé d’examiner le « fardeau administratif et réglementaire » afin de l’alléger pour favoriser le développement des entreprises. Le comité, qui porte le titre de « Groupe conseil sur l'allégement réglementaire », est présidé par Bernard Lemaire, PDG de Cascade. À ce dernier s’ajoutent huit autres représentants des secteurs patronaux et de deux représentants syndicaux.
Or, bien que son mandat s’inscrit à l’origine dans l’ordre du technique et de la simplification des procédures, le groupe fera des recommandations portant sur la modification de l’article 45 du code du travail (modifié depuis par Charest), sur l’équité salariale (à laquelle le patronat s’opposait ardamment à l’époque) et sur le régime de la CSST. Ces recommandations provoqueront le départ des deux représentants syndicaux qui claqueront la porte du comité et désavoueront tant son rapport que son président.
Autrement dit, les patrons ont une légère tendance à assimiler tout ce qui peut entraver leurs activités à des aspérités techniques qu’il faudrait aplanir. Et imaginez ! on parle là de nos tout petits patrons québécois, tous gentils!, dont la plupart proviennent de PME. Disons que je m’attend à ce que les trente plus gros patrons du continent aient un appétit passablement plus féroce.
Alors, institutionnaliser formellement un même genre de processus, mais avec trois chefs d’État très, très conservateurs et proches des patrons, ça me chicote un peu et je ne suis pas certain que je leur fait entièrement confiance pour définir ce qui est politique et ce qui est technique. C’est que, voyez-vous, la frontière qui sépare ces deux-là a ceci de particulier qu’il s’agit précisément d’un enjeu technique ET politique. Pas besoin de démoniser les patrons ou de se dire que le Grand Capital contrôle le monde via des sociétés secrètes. Il suffit de s'informer un peu sur le truc pour se rendre compte qu'il y a quelque chose qui cloche.
Tout ça pour dire que focaliser sur les manifs et le fait qu’il y ait 3-4 manifestants qui n’ont pas de contenu, ça me semble être à côté de la track et passer à côté d’enjeux importants.
[Edit: et il y a évidemment les clowns qui résument le dossier aux "frustration à l’égard du système politique et du capitalisme" qui animent les manifestants. Du coup, il n'y a pas besoin de se poser la moindre question. Yen a pas de problème! C'est des hippies ! ]
Heureusement, en même temps, le Devoir avait aujourd'hui plusieurs articles fort intéressants avec cette chose si rare dans les pages de la Presse qu'est le contenu. Ici, ici, ici, ici et ici. [Edit: les deux derniers ne concernent pas le PSP, mais je les ai mis parce qu'ils sont fort intéressants pour qui s'intéresse à la mondialisation et à l'évolution de l'économie mondiale.]

Enfin, je m'abstiendrai de commenter le si lamentable texte de Mario Roy paru samedi qui incarne si bien, encore aujourd'hui, à lui seul ce qui rend si détestables les éditorialistes, soit ce mélange d'arrogance et de suffisance, tartinée sur une bonne couche bien grasse d'ignorance des choses dont ils parlent mais sur lesquels ils ne s'autorisent pas moins toujours à discourir.


This page is powered by Blogger. Isn't yours?