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26 juillet 2007

Sans foie ni l'oie 


[Avis au lecteur : il est possible que le mauvais foie du bloggueur ait été quelque peu engraissé.]
Moi, j’aime bien manger, et manger bien. Et moi, le hippisme, c’est un nébuleuse idéologique qui, ma foie, me donne souvent des douleurs au foie (à moins que ce soit parce que je bois trop?? Nan, impossible.). Au sein de cette nébuleuse, on trouve l’animalisme qui fait, encore une foie, beaucoup parler ces jours-ci autour de la question du foie gras et du scandale des images tournées chez Élevages Périgord. Je vous fais part de deux-trois trucs vu là-dessus dans Le Devoir de ce matin:

Les meilleurs arguments que j’ai lus à propos du délire anti-foie gras viennent de Jacques Cerf, auteur du livre de recettes Le Foie gras au Québec, à qui j'ai repiqué le titre de sa lettre:
Le foie gras au Québec, c'est aussi ce qui distingue le Québec du reste de l'Amérique du Nord. Quand on voit comment ont évolué la culture gastronomique et la restauration depuis 20 ans, on se rend compte que les Québécois sont à la recherche d'une qualité de vie qui repose entre autres sur la qualité et la diversité des produits qu'ils mettent dans leur assiette. Il n'est pas surprenant de voir que la plupart des pays qui ont interdit le foie gras sont des pays où sévit le puritanisme, où la culture gastronomique est limitée et les traditions culinaires, peu nombreuses.

Le foie gras est un chef-d'oeuvre de la nature (même si on l'aide un peu dans la dernière étape). C'est un festival de délicatesse et de saveurs multiples. Il existe des centaines de façons de le préparer avec du sucré ou du salé. Je plains les végétariens qui se refusent ce plaisir et, sans essayer de les convaincre, je leur rappelle que c'est l'homme qui a créé la division entre les végétaux et les animaux, et qu'au niveau unicellulaire, la différence entre végétal et animal est peu visible. Parfois, je me demande quelle attitude ils doivent adopter par rapport aux plantes carnivores...
De l’autre côté, on a un chargé de cours de philosophie (Philo!? Pffff!!) qui fait dans le hippisme sophistiqué et qui reprend des arguments moralistes passablement convenus, du genre, « ce n’est pas naturel ». Bout de ciarge qu’il nous faudra abandonner des choses si on s’interdit tout ce qui n’est pas naturel au critère du « n’est pas naturel tout ce qu’on ne trouve pas a priori dans la nature sans que l’homme y ait touché ». Comme le dit si bien le savant gourmet cité plus haut, les divisions animaux-humains, et animaux-végétaux, auxquelles j’ajouterais celle de naturel-artificiel/ contre-nature/etc., ce sont des catégories construites au fil du temps par l’être humain pour appréhender le monde autour de lui. À moins bien sûr que l'on adhère mordicus à un genre de cadre métaphysico-théologique qui aurait établi un certain partage une foie pour toute devant l’éternel, elles n’ont pas de fondement « objectif » ou scientifique inébranlable. Ce qui ne veut pas dire qu’il faille les abandonner ou qu’elles ne soient pas significatives. Il faut seulement avoir cela en tête lorsqu’on les invoque. Notre hipphilosophe écrit aussi:
[..] pour ce qui est de l'exemple français, il faut préciser que c'est donc pour se protéger de la pression de l'Union européenne que la France a voté en automne 2005 un amendement qui stipule que «le foie gras fait partie du patrimoine culturel et gastronomique protégé en France». Un amendement motivé par de nombreux sophismes, en particulier l'appel à la tradition et l'alibi économique, que j'ai déjà dénoncés ailleurs (L'Express, 15 décembre 2005).
Si le foie gras ne fait pas partie du patrimoine culturel et gastronomique français, je me demande bien ce qui peut en faire partie... Sans doute qu'il faudra aussi abandonner le vin parce que de pauvres raisins sans défense sont écrasés dans le processus de fabrication, et le fromage, parce que non seulement ne trouve-t-on pas de fromage à l'état naturel, mais les pis de bovidés n'ont pas été conçus pour être touchés par rien d'autre que les bouches de leur petits.
Non mais des foies...

[EDIT: Pour ceux que ça intéresserait, j'ai retrouvé le texte auquel il est fait référence dans le dernier extrait. Je l'ai mis en commentaire
C'est un peu l'exemple parfait du mauvais usage de la rhétorique dans un texte argumentatif: à chaque fois, il prend un argument sous la forme d'une phrase bien précise et circonscrite; il trouve un contre-argument restant toujours uniquement dans l'ordre du discours (sans égard au réel ou à quelconque autre élément qui ne figure pas expressément dans l'affirmation) et considère ensuite qu'il a disposé à tout jamais de l'argument de départ...
Par exemple, il "dispose" de l'argument patrimonial par une comparaison avec la corrida et l'excision, deux pratiques prétendant à la légitimité par la référence à la tradition. Primo, mon chou, il y a quand même quelque chose comme une différence de nature entre l'excision et le fois gras (du moins, me semble-t-il) et deuzio, mon cher lapin*, il n'y a aucun problème à considérer l'importance du patrimoine et de la tradition dans une discussion rationnelle tant et aussi longtemps qu'on n'y accorde une importance qui est relative et non pas absolue. Par rapport au foie gras, l'argument patrimonial n'est certes pas valide à lui seul, mais mis dans la balance avec les autres arguments, il a une validité certaine qui doit être considérée.
Quant à son affirmation "C'est un sophisme bien connu sous le nom d'argumentum ad antiquitam", moi je dis que c'est un argumentum ad peteux de broum qui n'apporte strictement rien à la discussion, sauf pour tenter d'appuyer l'image de pseudo autorité argumentative que l'on veut donner de soi. C'est un peu du name-droping, version latin.
Il doit bien y avoir un nom de sophisme en latin pour désigner l'argument qui procède par comparaison qui n'a aucune os**e d'allure ?? L'argumentum ad comparaisum bullshita ? C'est que j'ai comme l'intuition qu'il est moitié complètement démago, moitié complètement débile de mettre en comparaison le gavage d'oies et l'ablation du clitoris de jeunes filles. Mais je crois bien que je suis inutilement sensible.
* Si au chou et au si joli lapin, on ajoute des carottes, des lardons, des oignons, du vin et du bouillon, et que l'on laisse mijoter au moins une heure, et on aura un excellent ragout! Le lapin, il y a beau être cute, il ne le sera jamais autant qu'il goûte bon...]


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