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5 décembre 2005

L'holocauste de Lapierre 


Ainsi donc, aux dires du sinistre Jean Lapierre, le chef bloquiste utilise un langage chargé d'"un petit côté naziste" (sic - un dictionnaire pour Noël, Ti-Jean?) lorsque celui-ci souhaite "la disparition des Libéraux" de la carte électorale du Québec.

Plus tôt ce matin, Duceppe a cru bon s'excuser publiquement pour avoir émis ce souhait, à l'occasion d'un ralliement, hier après-midi. Convenons que le chef des troupes bloquistes s'est emballé trop vite. Sa seule erreur, jusqu'à date, est d'avoir fait preuve d'un triomphalisme prématuré, qu'on devine encouragé par la publication des derniers sondages, ravageurs pour le camp libéral sur le terrain du Québec.

Cela n'excuse cependant pas la teneur des propos de Lapierre, qui vient de déraper dangeureusement dans cette course électorale, laquelle n'en est encore qu'à sa première semaine. Je tiens d'emblée à préciser que, sans parti pris, je dénoncerai tout politicien se permettant ce genre de propos tendancieux, qu'il soit bloquiste, libéral ou marijuaniste.

Doit-on d'abord rappeler à Lapierre ce qu'est le nazisme? Extrait de Wikipedia (français): "Le nazisme tendait à considérer l'humain inférieur comme du bétail et a constitué la forme la plus extrême du racisme, principalement axé sur l'antisémitisme, mais n'épargnant pas non plus les Slaves, les Asiatiques, et les Arabes, classés au plus bas dans l'échelle des races, juste avant les noirs." La définition anglaise pourrait aussi l'éclairer: "According to Nazism, it is an obvious mistake to permit or encourage multilingualism and multiculturalism within a nation."

En réalité, personne ne devrait être remémoré la définition du nazisme. L'histoire contemporaine est déjà assez marquée par cette idéologie qui, si elle remporte toujours la faveur chez certains individus, ne peut, en aucun cas, être associée à la vie politique canadienne. Lapierre craint-il l'holocauste libérale au Québec, un coup parti? Voilà jusqu'où peut mener ce genre de langage.

Je crois que la population admet que les politiciens mentent, en particulier durant une campagne électorale. Les promesses, on sait ce que ça donne. Mais il y a une limite que la rhétorique électoraliste ne doit pas franchir, et Lapierre vient de la traverser. La faute est énorme, et je suis consterné d'entendre le député libéral de la région de Toronto invité chez Maisonneuve, à la Première Chaîne, nuancer les propos de Lapierre sans exiger leur retrait. En plus, si ça se trouve, ledit député pourrait bien être Juif! À mon sens, c'est moins l'outrage aux Québécois - qui voteront en majorité pour le Bloc, seront-ils donc "un peu nazistes" (sic) par association, eux aussi, Monsieur Lapierre?- que celui fait aux Juifs, et à la mémoire, qui mérite des excuses.

Ce langage outrageux serait-il un signe des temps? A-t-on fini par banaliser le traitement fait à des millions de Juifs au cours de la Seconde Guerre mondiale? Aux États-Unis, l'utilisation des termes "Nazi" et "nazisme" a déjà fait l'objet d'une attention particulière par les observateurs des médias (les fans du Daily Show se souviendront d'ailleurs d'un segment s'y attardant). La pundit de droite Ann Coulter a déjà abusé du terme, à plus d'une occasion d'ailleurs, provoquant plusieurs cris d'alarme dans la presse généralisée. Plus récemment, le réalisateur Robert Greenwald, auteur du percutant documentaire Wal-Mart: The High Cost of Low Price, a récemment été taxé de "propagandiste Nazi" par le New York Post de Rupert Murdoch! Avancer de tels propos, c'est déformer la réalité à des fins partisanes.

Lapierre a créé un précédent dans cette campagne en comparant un parti politique reconnu et respecté au régime hitlérien - et il reste encore une quarantaine de jours à cette campagne! Pour l'instant, il ne se serait pas excusé, ni rétracté (correction: Paul Martin a déclaré "que Jean Lapierre était allé trop loin" dans sa comparaison, ajoutant toutefois que sa sortie avait été "préparée"...). Les électeurs ont le devoir de faire savoir à leurs politiciens qu'il y a des limites à user de son droit de libre-expression. Pour envoyer un courriel à Paul Martin: pm@pm.gc.ca.


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