Petite bombe dans la blogosphère québécoise: le 3 mars dernier, le journaliste François Cardinal, éditorialiste à La Presse, se commet dans un éditorial intitulé Blogger pour ne rien dire.

"Pour paraphraser Tom Rosentiel, du Project for Excellence in Journalism, les blogues doivent être pris pour ce qu’ils sont: l’équivalent de la machine à café, c’est-à-dire l’endroit où les gens discutent de manière informelle de tout et de rien. Rien de plus.", termine-t-il dans cet éditorial, dans lequel il souligne également le fouillis patenté de la blogosphère.

Son éditorial a fait réagir moult acteurs de la blogosphère québécoise, qui jugent son opinion tranchée et dénoncent surtout son manque de vision, caractéristique, selon plusieurs, de l'attitude des journalistes oeuvrant dans les médias traditionnels lorsque vient le temps de considérer la "révolution des blogues".

Le journaliste du Devoir Michel Dumais est allé plus loin que de simplement critiquer l'éditorialiste; il a sainement ouvert le dialogue avec celui-ci, invitant du coup les bloggeurs (et leurs lecteurs) à se joindre à cette passionnante discussion sur la "révolution" des blogues (que Cardinal ne voit toujours pas). Sur le carnet de Michel Dumais, Ouvert 24 heures - Verres stérilisés est reproduit l'éditorial litigieux, ainsi qu'une réponse de Cardinal. À lire.

Permettez que j'ajoute mon grain de sel. Je crois que cette façon de percevoir les blogues est d'une part un peu facile: impossible de se retrouver dans la blogosphère?, se plaint Cardinal. Pourtant, il en est ainsi de l'internet: soumettre un mot à Google, c'est inévitablement être condamné à devoir trier parmi des milliers de références, pas toujours pertinentes, comme vous savez. Par ailleurs, Cardinal dénonce l'absence d'un "Google pour les blogues". Ce n'est pas tout à fait exact, vous qui connaissez les métablogs et leur utilité pour rechercher des carnets portant sur des sujets précis. Ce qui ne nous allège pas de la tâche de devoir faire le tri parmi tous ces résultats, c'est notre lot à nous tous, utilisateurs de Google, blogueurs ou non.

Mais au-delà de ces technicalités, cette attitude qu'on peut percevoir comme condescendante envers les blogues reflète aussi le "snobisme" des médias traditionnels vis à vis les médias dits "alternatifs". Je pourrais m'étendre là-dessus, mais je préfère entrevoir le jour où cette attitude sera différente. Car cette situation pourrait bien être bouleversée: il suffirait qu'à l'instar de la blogosphère américaine, les carnettistes québécois déterrent un scoop (genre l'affaire Dan Rather, ou les propos du président de CNN, ou l'affaire Lewinski) et que les médias traditionnels soient forcés de le reprendre pour que la perception des "snobs" soit changée. Enfin, pas officiellement, bien sûr: les journalistes seraient probablement portés à s'approprier la nouvelle... mais eux, comme nous blogueurs, sauront que la blogosphère québécoise (et les médias alternatifs) auront marqué un point.

Le débat est ouvert.